La décision vient d’être publiée et malheureusement celui ci a validé l’ensemble de l’article nous concernant ; l’instruction en famille sera désormais soumise à autorisation des la rentrée 2022.
- Le Conseil constitutionnel était également saisi de l’article 49 de la loi déférée réformant les conditions dans lesquelles l’instruction obligatoire peut être dispensée en famille.
Selon ces dispositions, l’instruction obligatoire peut, par dérogation à la règle selon laquelle elle est donnée dans les établissements ou écoles publics ou privés, être dispensée en famille par les parents ou par toute personne de leur choix sur autorisation délivrée par l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation. Sans que puissent être invoquées d’autres raisons que l’intérêt supérieur de l’enfant, cette autorisation est accordée soit en raison de l’état de santé de l’enfant ou de son handicap, soit en raison de la pratique d’activités sportives ou artistiques intensives, soit en raison de l’itinérance de la famille en France ou de l’éloignement géographique de tout établissement scolaire public. Il est également prévu que cette autorisation soit accordée en raison de l’existence d’une situation propre à l’enfant motivant le projet éducatif.
Il était notamment reproché à ces dispositions, par deux des recours, de méconnaître le principe fondamental reconnu par les lois de la République de liberté de l’enseignement, dont l’instruction en famille serait une composante depuis sa reconnaissance par la loi du 28 mars 1882. La soumission de la possibilité d’instruction en famille à un régime d’autorisation préalable en lieu et place d’un régime de simple déclaration ne serait pas nécessaire dès lors que l’objectif poursuivi est imprécis et qu’il est toujours possible à l’autorité administrative d’opérer des contrôles a posteriori de l’instruction en famille. Il était également reproché à ces dispositions de ne pas prévoir que la demande d’autorisation d’instruction en famille puisse être motivée par des convictions politiques, religieuses ou philosophiques. Il en serait résulté une méconnaissance de la liberté d’opinion et de la liberté de conscience. En outre, un pouvoir d’appréciation trop important serait laissé à l’autorité administrative pour octroyer ou refuser l’autorisation d’instruction en famille.
Le Conseil constitutionnel juge que, en prévoyant que « L’instruction primaire est obligatoire … elle peut être donnée soit dans les établissements d’instruction primaire ou secondaire, soit dans les écoles publiques ou libres, soit dans les familles, par le père de famille lui-même ou par toute personne qu’il aura choisie », l’article 4 de la loi du 28 mars 1882 portant sur l’organisation de l’enseignement primaire n’a fait de l’instruction en famille qu’une modalité de mise en œuvre de l’instruction obligatoire. Il n’a ainsi pas fait de l’instruction en famille une composante du principe fondamental reconnu par les lois de la République de la liberté de l’enseignement. Il en déduit que le grief tiré de la méconnaissance de la liberté d’enseignement ne peut qu’être écarté.
Examinant les dispositions de l’article 49 prévoyant que l’autorisation d’instruction en famille est accordée en raison de « l’existence d’une situation propre à l’enfant motivant le projet éducatif sous réserve que les personnes qui en sont responsables justifient de la capacité de la ou des personnes chargées d’instruire l’enfant », le Conseil constitutionnel juge que, d’une part, en subordonnant l’autorisation à la vérification de la « capacité … d’instruire » de la personne en charge de l’enfant, ces dispositions ont entendu imposer à l’autorité administrative de s’assurer que cette personne est en mesure de permettre à l’enfant d’acquérir le socle commun de connaissances, de compétences et de culture défini à l’article L. 122-1-1 du code de l’éducation au regard des objectifs de connaissances et de compétences attendues à la fin de chaque cycle d’enseignement de la scolarité obligatoire. D’autre part, en prévoyant que cette autorisation est accordée en raison de « l’existence d’une situation propre à l’enfant motivant le projet éducatif », le législateur a entendu que l’autorité administrative s’assure que le projet d’instruction en famille comporte les éléments essentiels de l’enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme d’apprentissage de l’enfant.
Par une réserve d’interprétation, le Conseil constitutionnel juge qu’il appartiendra, sous le contrôle du juge, au pouvoir réglementaire de déterminer les modalités de délivrance de l’autorisation d’instruction en famille conformément à ces critères et aux autorités administratives compétentes de fonder leur décision sur ces seuls critères excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit.
Par l’ensemble de ces motifs, il juge que les dispositions contestées ne sont pas entachées d’incompétence négative et ne méconnaissent pas l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi. En outre, si les dispositions contestées prévoient que l’autorisation d’instruction en famille est accordée sans que puissent être invoquées d’autres raisons que l’intérêt supérieur de l’enfant, elles n’ont ni pour objet ni pour effet de porter atteinte à la liberté de conscience ou d’opinion des personnes qui présentent un projet d’instruction en famille.